Covid-19, vers une reprise des activités
La situation imposait depuis le 23 mars un confinement strict au sein de nos structures d’accueil des enfants des rues de Kinshasa.
Au fil de ces quatre mois, il a fallu s’adapter, se poser de multiples questions, se remettre en cause en permanence tant pour les éducateurs que pour les enfants qui avaient accepté de vivre ensemble ce confinement.
Ndako ya Biso a du revoir toute son organisation. Chaque jour demandait aux animateurs d’être inventifs pour répondre au mieux aux besoins des enfants. Ceux-ci ont vécu cet enfermement avec une certaine ambivalence : fort sentiment de joie pour l’assurance de trois repas par jour et d’un matelas confortable la nuit, mais grande frustration également car ils sont habitués à une certaine liberté dans la rue avec, entre autres, la consommation de drogues.
Il est certain que tout ce qui a été vécu mérite d’être analysé. Cela nous permettra d’améliorer notre démarche pour amener ces enfants en situation de rue à croire qu’un avenir meilleur est possible.
Cette longue période de confinement restera dans la mémoire de chacun.
Les enfants ont eu beaucoup de temps pour réfléchir.
Un thème différent chaque semaine a été choisi pour les amener à discuter entre eux, à donner une opinion, à trouver des débuts de réponse et de solution sur des sujets très variés.
Deux thèmes parmi d’autres :
– Comment me sentir responsable de la joie et du bien-être de mes amis ?
– Mon avenir se prépare aujourd’hui.
Les séances d’alphabétisation et de remise à niveau scolaire ont connu un grand succès. Cela va nous amener à renforcer encore cette activité dans l’avenir.
Les garçons ont été regroupés en trois classes et les filles en deux classes suivant leur niveau. Tous les jours, ils ont suivi des cours de français et de calcul.
Les enfants se sont montrés attentifs et intéressés. Ils étaient très contents d’apprendre et bien plus motivés que prévu. Ils voulaient même prolonger les cours au-delà du temps imparti !
Ceux qui n’étaient jamais allés à l’école étaient fiers d’apprendre les rudiments du français. Ils s’amusaient à employer cette langue entre eux :« On est maintenant élèves comme tous les enfants, on doit aussi parler en français » dit un enfant.
Les activités sportives ont su leur redonner confiance dans leurs capacités individuelles mais aussi collectives. Plusieurs tournois de foot ont été organisés, ils ont permis de souder le groupe et d’aborder avec les enfants des thèmes importants comme l’entraide, le partage et la confiance mutuelle.
Au début du confinement, 18 enfants n’ont pas pu supporter l’enfermement. Ils ont préféré fuguer et retourner dans l’insécurité de la rue. Or le contrat passé avec les enfants le 23 mars était que celui qui sortait ne pouvait plus revenir car il risquait de contaminer ses camarades et les éducateurs.
Deux d’entre eux ont choisi de retourner vivre chez leurs parents. Mais les 16 autres, pleins de regrets, revenaient chaque jour trainer autour du centre avec l’espoir qu’on les ferait rentrer.
Une équipe d’animateurs s’est alors installée avec eux dans une école voisine, fermée elle aussi pour cause de Covid. Au terme de dix jours de quarantaine, les enfants ont réintégré le centre Ndako ya Biso.
Cela a été l’occasion d’aborder le thème du pardon et le défi de la semaine était celui de leur préparer un bon accueil, de ne pas fermer la porte, de savoir qu’il y avait assez à manger pour partager avec tous.
La joie des retrouvailles a été grande !
Fin juin, au moment où il devenait plus facile de circuler, nous avons voulu les accompagner au bord d’une rivière aménagée où l’on peut s’amuser, passer du bon temps.
Les mesures restrictives demandent encore que l’on évite les groupes trop importants. C’est ainsi que quatre journées ont été organisées pour permettre aux 80 enfants de passer une journée de détente.
A chaque fois, on a retrouvé la même ambiance !
Ils ont chanté toute une partie de la route. Ils étaient étonnés de revoir le rond-point Ngaba toujours embouteillé mais aussi les terrasses des cafés et des bars fermées en raison du confinement.
Arrivés sur place, tous les enfants se sont précipités pour plonger et replonger dans la rivière, s’arroser mutuellement et jouer au ballon.
Les éducateurs étaient aussi heureux qu’eux de se retrouver dans ce lieu calme au bord d’une petite rivière propre. Pour une fois, le seul objectif était la détente, il n’y a donc pas eu d’écoute individuelle des enfants. Même si … certains enfants se sont arrangés pour trouver un petit moment plus intime à partager avec l’éducateur. Des émotions sont remontées…
Accompagné d’une bouteille de boisson sucrée, un bon repas de poulet et de chikwangue pris autour de petites tables a réjoui les enfants qui ont demandé de rester une semaine sur place, ou à défaut de pouvoir revenir chaque semaine dans ce bel endroit !
Arriver à faire confiance est un premier pas vers une réunification familiale réussie !
C’est ce sentiment qui s’est exprimé lors de la journée de détente qui marquait la fin du confinement.
Souhaitons que cette période difficile puisse avoir des retombées positives pour les 80 enfants (garçons et filles) que nous avons pris en charge durant ces trois longs mois.
Les éducateurs ont à présent repris leur travail de terrain à la rencontre des enfants dans la rue. Ils ont également recommencé leurs visites aux familles pour le suivi des 720 enfants réunifiés pris en charge sur le plan scolaire ou en formation professionnelle.
Ces enfants nous ont accordé leur confiance et comptent sur notre présence à leurs côtés.
Pour les aider, n’hésitez pas à faire un don ou à parrainer l’action du centre Ndako Ya Biso.